Le decret d'application de la loi Carle, explications

Publié le par defendrelacommunale

93E CONGRES DES MAIRES

Des élus de communes rurales, en particulier la Fédération nationale pour l'école rurale, ont exprimé leur colère contre le gouvernement, à l'occasion du 93e Congrès des maires (23-25 novembre 2010).

Selon eux, le décret d'application de la loi "Carle" du 9 novembre 2010 vide de son sens le mécanisme qui permet aux communes qui justifient de leur capacité d'accueil à ne pas verser de participation financière lorsqu'un élève est scolarisé dans une école privée située sur le territoire d'une autre commune. Pourtant, de nombreuses communes pensaient que leur appartenance à un "regroupement pédagogique intercommunal "(PI) , impulsé à l'époque par l'Etat, leur permettrait justement d'établir leur capacité d'accueil... Que nenni !

Entretien avec Pierre Souin, maire de Marcq (Yvelines), vice-président de la Fédération nationale pour l'école rurale et Christian Fournier, maire de Saint-Martin-Valmeroux (Cantal)


La Gazette des communes : "Un décret du 9 novembre vient compléter la loi Carle. De quelle façon ?"
Pierre Souin. Jusqu'à présent, les regroupements pédagogiques intercommunaux n'étaient pas pris en compte par la loi "Carle". Nous avions fait une demande auprès des parlementaires.  Les regroupements pédagogiques intercommunaux peuvent être crées à l'initiative des communes. Certains regroupements déconcentrés sont assez élaborés et efficaces : par exemple, une commune s'occupe des cours préparatoires, l'autre les cours élémentaires et la troisième les cours moyens.

La rédaction : Que prévoit la loi Carle ?
P. S. Dans ce dispositif, si la commune ne propose pas de cours préparatoires, qui, selon les termes, n'établit pas qu'elle à une « capacité d'accueil », la commune devait financer l'école privée qui, dans une autre commune, accueille l'enfant.

Qu'attendiez-vous de ce décret d'application ?
P. S. Nous demandions que les regroupements pédagogiques intercommunaux soient pris en compte dans leur globalité. Ainsi, même si la commune n'accueille pas de classe de cours préparatoire sur son territoire, elle peut établir une « capacité d'accueil, puisque le regroupement pédagogique intercommunal auquel elle appartient assure ce service.

... Et ce n'est pas le sens du décret ?
P. S. - Nous sommes très surpris. Le décret prend bien en compte les regroupements pédagogiques intercommunaux, mais oblige les communes membres à transférer leur compétence scolaire à un EPCI, soit une communauté de communes soit une communauté d'agglomération. Or, nous souhaitons que les communes gardent la compétence scolaire. Les communes qui se sont regroupées en regroupements pédagogiques intercommunaux, parfois contraintes par les institutions, préfecture ou l'inspection académiques, mais souvent aussi, au terme d'un réel engagement et investissement, après concertation avec les parents.
Le décret, se révèle n'être qu'un outil pour pousser à créer des établissements publics d'enseignement du premier degré, c'est-à-dire des énormes regroupements pédagogiques concentrées qui obligent les communes à perdre leur écoles de village.
Il y a eu de la duplicité dans la rédaction de ce décret...

M. Fournier, partagez-vous aussi ce sentiment d'être floué par le décret ?
C. F. Pour le milieu rural, c'est très grave. Dans mon canton par exemple, sur 12 communes 3 ont conservé une école, en recourant, sous la pression de l'académie, à des regroupements pédagogiques. L‘article 89 de la loi Carle oblige toutes les commune à payer si les parents décidaient de scolariser leurs enfants ailleurs. Pour ainsi dire, les maires payaient pour tuer leurs propres écoles ou regroupements pédagogiques. La loi Carle est venue apaiser les élus, très remontés, toutes tendances confondues. Selon la loi «Carle », si une commue établit qu'elle a bien une capacité d'accueil suffisante, elle n'a pas à payer.

Comment s'interprète la capacité d'accueil dans le cadre de regroupements pédagogiques intercommunaux ?
C. F.Avant la publication du décret d'application du 9 novembre, tout le monde pensait que les RPI, seraient considérés comme établissant la capacité d'accueil de chaque commune membre. Mais en réalité, le décret vide complètement le mécanisme de la loi Carle de son sens en ne le permettant que si les RPI sont adossées à une intercommunalité. Dans la réalité existe très peu de RPI rattachées à une interco.

C'est donc une déception
C. F.Oui. Même s'il elles font parties d'un RPI, les communes devront payer la contribution pour scolarisation dans une école privée, alors même que le regroupement, souvent imposé par l'académie, a pour objet d'assurer cette capacité d'accueil au niveau de plusieurs communes.

Que comptez-vous faire ?
Pierre Souin. Nous allons remonter au créneau contre ce décret. C'est une volonté de l'Association des maires ruraux de France (AMRF) de conserver la compétence scolaire au niveau des communes. La Fédération nationale des écoles rurales entend bien alerter les parlementaires sur cette question. Lorsque le sénateur Colombat avait, lors des débats sur la loi Carle, mentionné les RPI, ce n'était pas du tout dans le sens et avec les visées qui sous-tendent le décret du 9 novembre.

Références
Décret n° 2010-1348 du 9 novembre 2010
fixant les conditions de prise en charge des dépenses obligatoires des communes participant à un regroupement pédagogique intercommunal en application de l'article L. 442-5-1 du code de l'éducation , JO du 11 novembre 2010
Loi n° 2009-1312 du 28 octobre 2009 tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence

Pour aller plus loin sur le 93e Congrès des maires

 

 

Propos recueillis par Jean-Marc Joannès

 

Source : http://www.courrierdesmaires.fr/actualite/france-regroupements-pedagogiques-intercommunaux-les-elus-ruraux-se-sentent-floues-21861.html?dossier=188

 

Publié dans Et l'école privée

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